Le vendredi 11 juillet, le Tribunal de
première instance de Lomé a ordonné l’expulsion d’Accor de Mercure
Sarakawa, sous astreinte de 500.000 FCFA par jour de résistance. L’Etat
togolais, propriétaire de l’hôtel, reproche au groupe français le non
respect des clauses de son bail. Ce matin, c’est un branle-bas dans le
camp de l’hôtelier français pour vider les lieux. Mais Accor ne s’avoue
pas vaincu, la rupture du contrat pourrait coûter à Lomé plus de 10
millions Euros, suite à une requête en arbitrage auprès de la Chambre de
commerce international (CCI) de Paris.
L’Etat du Togo et Accor étaient en froid depuis plusieurs mois, à
l’approche de la fin du bail de l’hôtelier français. Les Français
demandent un renouvellement du bail, ce n’est pas l’avis de l’Etat du
Togo, qui reproche à l’hôtelier français de ne pas avoir respecté les
termes du contrat. Quand il a pris l’hôtel Sarakawa le 18 février 1998
pour 15 ans de bail, c’était sous condition d’y entreprendre des travaux
de rénovation pour une exploitation selon un standing international de
« 4 étoiles ».
Selon l’Etat togolais, ces conditions n’ont jamais été respectées. Non
seulement Accor n’a jamais entrepris les travaux, mais gérait l’hôtel
selon une norme « 3 étoiles ». Il y a pire, la carence de la gestion est
telle que même le standing « 3 étoiles » n’est pas respecté. Comme
l’atteste ce rapport de l’Etat :
«(…) les différents ouvrages composant le complexe, se trouvent
aujourd’hui à la limite de leurs possibilités techniques. Si les
structures béton sont toujours en bon état, les matériaux et revêtements
de protection ne remplissent plus leur fonction première et secondaire
(protection des ouvrages notamment étanchéité et aspect visuel et
esthétique).
Depuis la date de construction de l’hôtel, aucun ravalement de fonds n’a
été effectué, sinon un peu de peinture, des raccords d’étanchéité, des
bouchages de trous ou de fissures. Ces différents travaux d’entretien
n’ont pas été réalisés dans les règles de l’art, et va exiger une
reprise complète avec des incidences financières non négligeables
(décapage des différentes couches successives de peinture, reprise des
relevés d’étanchéité, traitement des murs contre les différents
désordres chimiques et biologiques). L’état des immeubles ne supportera
plus très longtemps les conditions climatiques », démontre le rapport.
Un rapport qui vient confirmer des rumeurs fort persistantes en ce qui
concerne la gestion de cet hôtel, des chambres avec des odeurs, des
sanitaires défaillants.
Ayassor et Bénissan tirent le dossier à hue et à dia
Mais l’affaire serait plus compliquée que ne l’ont résolue l’Etat du
Togo et le Tribunal de première instance. Selon La Lettre du continent,
N°685 du 25 juin, Faure Gnassingbé aurait laissé entendre à Accor qu’il
lui prolongerait le bail. Le président de la République l’aurait
garanti à François Hollande lors de sa visite à l’Elysée en novembre
2013, soit deux mois après l’expiration du bail.
Cependant le Secrétaire général de la Présidence de la République, Daté
Patrick Benissan, a été dessaisi du dossier par le ministre Adji Otèth
Ayassor, le tout-puissant ministre des finances.
Sentant la volonté de les expulser et sachant que le Tribunal de
Première instance devait normalement prononcer l’expulsion depuis le 25
juin dernier, les Français ont dans l’urgence déposé le 6 mai dernier,
une requête en arbitrage auprès de la Chambre du commerce international
de Paris (CCI), contre la Société togolaise d’investissement et
d’exploitation hôtelière (STIEH).
D’après certaines sources, l’Etat du Togo pourrait être condamné
pourrait être tenu commercialement de verser une indemnité d’éviction
estimée à 10 millions Euros.
L’Etat togolais est régulièrement condamné par les instances
internationales pour rupture abusive de contrats. Ce fut le cas dans
l’affaire de la Compagnie d’énergie électrique du Togo (CEET) dont la
gestion a été confiée aux Franco-canadien d’Elyo-HydroQuébec. Le Centre
International de Règlement des Différends relatifs à l’Investissement (
CIRDI ) a condamné le Togo en 2012 à payer 45 millions au groupe
canadien, soit 29 milliards CFA. Lomé a été épinglé dans d’autres
affaires similaires sur le plan international, payant des indemnités
énormes, aux frais du contribuable.
On espère que cette fois le très zélé ministre des finances Adji Otèt
Ayassor ne risque pas d’entraîner le Togo dans un gouffre financier, en
prenant une décision certes peut-être courageuse mais malavisée.
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