Le
mois du civisme ! Voilà un concept instauré depuis l’année dernière par
le gouvernement pour engloutir des millions dans un projet pour lequel
les Togolais ne trouvent aucun intérêt.
« Lancée en octobre 2014, la première édition du
mois du civisme a suscité un réel engouement et a souligné la nécessité
de poursuivre cette initiative pour renforcer l’esprit civique et à
asseoir durablement une culture de la citoyenneté dans notre pays »,
lit-on dans le communiqué sanctionnant le Conseil des ministres du
mercredi 14 octobre dernier. C’est à croire que la culture de la
citoyenneté dont parle le gouvernement existe réellement au sommet de
l’Etat.
Ainsi, l’on apprend que le mois de novembre sera encore
déclaré « mois du civisme ». « Le ministère de la communication, de la
culture, des sports et de la formation civique se propose à cet effet de
renouveler l’expérience de l’an dernier, en organisant la deuxième
édition du mois du civisme au Togo dans le courant du mois de novembre
2015 », a poursuivi le communiqué. On se rappelle encore le folklore
organisé l’an dernier par Germaine Anaté Kouméalo, alors ministre de la
Communication et de la Formation civique, pour, disait-on, lancer le
mois du civisme.
Des pauvres élèves qui souffrent du
comportement incivique de leurs dirigeants sont mis au soleil sur
l’esplanade du Palais des Congrès. A l’intérieur, se sont réunies des
personnalités, celles-là même qui posent difficilement des actes
civiques. Elles étaient là avec des discours ronflants.
Chacune
appelait au sens du civisme et à la citoyenneté car, à les en croire, «
l’éducation civique et citoyenne est un acte de chaque jour qui doit
permettre le mieux vivre ensemble, le renforcement de la démocratie et
l’édification d’une nation forte, unie et prospère », comme le stipule
le communiqué du dernier conseil des ministres. Et puis, plus rien.
C’est
à croire également que le mois du civisme se limitait seulement à la
cérémonie facturée à coup de millions. L’instauration du « Togo propre »
n’est suivi que par quelques citoyens, puisque le projet en soi ne
suscite aucun engouement populaire. Demander à un citoyen qui trouve
difficilement un repas par jour d’aller balayer la rue, sachant que ceux
qui sont au pouvoir ont pris en otage les richesses du pays, relève de
l’absurde. Le « mieux vivre ensemble, le renforcement de la démocratie
et l’édification d’une nation forte, unie et prospère » se fera
difficilement dans un pays où les richesses sont inégalement réparties.
Quelle
éducation civique donne-t-on aux citoyens lorsque les premiers
responsables du pays se livrent au pillage systématique des ressources,
au vu et au su de tout le monde ? Comment peut-on promouvoir l’éducation
civique dans un pays où les gouvernants refusent de donner une chance à
la décentralisation par l’organisation d’élections locales ?
Aujou
rd’hui,
comme le reconnaissent les observateurs, le Togo n’est qu’à l’image de
ses dirigeants. Il serait difficile d’imposer aux Togolais la règle
selon laquelle « faites ce que nous vous disons, ne regardez pas ce que
nous faisons ».
D’ailleurs, les populations ne trouvent pas
légitimes ceux qui leur demandent d’être de « vrais et bons citoyens »
puisqu’ils sont issus des élections frauduleuses. Organiser des
élections frauduleuses est-il un acte citoyen ? Il est facile de dire
aux populations de faire-ci ou de faire-ça, sans leur donner de bons
exemples.
Sûrement que la cérémonie de lancement du mois de
civisme que s’apprête à organiser le ministre de la Communication et de
la Formation civique va engendrer des dépenses inutiles. Comme au temps
de Germaine Anaté Kouméalo, il y en a qui se verront obligés de faire
le griotisme pour s’attirer les bonnes grâces du Prince. On en a déjà
vu l’année dernière et rien n’est sûr qu’ils ne rééditeraient pas cet «
exploit ». Après tout, ce sont eux qui s’érigent en donneurs de leçons.
Il
est clair que la notion de civisme doit commencer par le sommet de
l’Etat. Il faut peut-être enseigner aux gens comment ne pas voler les
deniers publics, comment éviter de percevoir des rétro-commissions sur
les passations des marchés publics qui pénalisent les travaux, comment
partager équitablement les richesses entre les filles et fils d’un même
pays de sorte à avoir la paix sociale et surtout comment organiser des
élections transparentes et crédibles et donner une chance à la
démocratie.
C’est à ce prix que les citoyens se sentiront
concernés par les affaires de la cité et deviendront de « bons citoyens »
capables de poser des actes civiques. Parce que lorsque la tête est
pourrie…
Kokou Mitimi (L'ALTERNATIVE)
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