Du 30 au 31 janvier 2015 les responsables de l’Organisation pour bâtir dans l’union un Togo solidaire (OBUTS) étaient en congrès, mais contre toute attente, Agbéyomé Kodjo, président de ce parti, a décliné le choix de ses militants d’en faire leur candidat. Pour ceux qui connaissent l’obsession de l’homme d’accéder à la magistrature suprême, ce refus était plus que suspect. Nous sommes de ceux qui le pensent aussi et donc, nous avons cherché à en savoir davantage.
« J’ai pris cette décision en tenant compte des messages que la vingtaine des partis politiques qui nous ont honorés de leur présence au début des travaux de notre congrès pour me charger de prendre des initiatives vis-à-vis de mes autres collègues de l’opposition, pour que nous puissions nous asseoir, discuter et voire si c’est possible, peser dans les négociations pour que les réformes se fassent avant les élections. Si j’accepte cette investiture, je suis de facto disqualifié pour mener à bien cette mission », essayé de répondre cet ancien Premier ministre pour justifier les raisons de son refus. Mais l’homme s’est trahi lorsqu’il a poursuivi en ces termes : « Demandez à M. Jean-Pierre Fabre de descendre de son piédestal que nous puissions ensemble démocratiquement choisir qui doit aller. Je dis peut-être dans cet exercice, il peut être notre candidat ; mais pour l’heure, il n’est pas le candidat de OBUTS. Il peut être aussi le candidat d’autres partis aussi. Donc qu’il descende ; mais bon, vous savez la dictature, l’arrogance, c’est moi d’abord, les autres après. Je pense que nous avons passé l’âge ». Ces mots, à notre sens, dénotent une certaine aversion de la personne du président de l’Alliance nationale pour le changement (ANC) qui, au vu des résultats des dernières législatives, est devenu chef de file de l’opposition de facto. Mais même s’il serait question de faire asseoir tous les leaders de l’opposition autour d’une table pour ensuite désigner le plus représentatif, la question est de savoir si c’est à Agbéyomé Kodjo que devrait revenir ce rôle, lui qui a été nourri au biberon du Rpt/Unir depuis des lustres.
La semaine dernière, nous avons appris que le président de l’Obuts s’était rendu ensemble avec l’ancien ministre Issa Samarou dans sa ferme à Tsévié, celui-là dont le procès venait de commencer le 29 janvier dernier après qu’il a mortellement percuté en état d’ivresse un jeune bachelier en septembre 2014. Nous avions relevé la désinvolture avec laquelle le responsable de la mort du jeune Goeh-Akué Carlton avait considéré cet accident. Nous apprenons aussi que c’est cet activiste du régime qui, ensemble avec l’ancien seigneur de l’ANR actuellement à la tête de la Gendarmerie nationale, qui auraient pour mission de « faire revenir la brebis au bercail après que celle-ci aura accompli sa mission au sein de l’opposition ». Et la source nous apprend qu’une nouvelle voiture de marque Prado lui aurait été offerte. Mais afin de brouiller les pistes et laisser ses militants dans l’ignorance la plus totale quant à sa provenance, il serait prévu de faire croire que la nouvelle voiture serait le fruit d’un récent gain à la loterie nationale, l’homme étant universellement reconnu comme un accroc à ce jeu.
Au vu de ce qui précède, Agbéyomé n’aura pas intérêt à voir Jean-Pierre Fabre porté à la tête de cette union dont il parle. Et puis, sur la base de quels critères le rôle de « rassembleur » lui reviendrait-il ? Une chose est certaine, Faure Gnassingbé rêve de faire croire au monde entier qu’après la présidentielle prochaine, il choisirait un opposant « au-dessus de la mêlée » et Agbéyomé Kodjo ne voulant pas compétir, peu de gens y comprendraient quelque chose si demain il était choisi comme Premier ministre. Les leaders de l’opposition, s’ils n’accèdent pas au pouvoir, devront alors y réfléchir par deux fois avant de manifester, car le spectre de Fléau Jardin ne s’est pas encore estompé dans la mémoire collective.
Pascal Ekoué
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