A peine entré en fonction, déjà salué pour ses bonnes œuvres. Lui, c’est le nouveau président de la Tanzanie, John Magufuli.
C’est une guerre qu’il a déclarée au gaspillage des ressources
nationales, à la corruption et autres fléaux connexes, donnant l’exemple
par la réduction drastique du train de vie de l’Etat. Des dispositions
d’esprit qui devraient simplement inspirer Faure Gnassingbé.
Les actes forts de John Magufuli de la Tanzanie
A peine quelques semaines de présidence et le numéro 1 tanzanien
séduit déjà par ses actes. C’était une promesse de campagne faite de
s’attaquer à la corruption et de gouverner autrement. Dans son discours
de politique générale devant le Parlement, John Magufuli
a promis de « mettre fin aux vices qui freinent la nation et
l’empêchent de sortir des millions de citoyens d’une abjecte pauvreté »,
évoquant les fléaux tels la corruption, la mauvaise gestion et le
gaspillage des ressources publiques. Au lendemain de son investiture, le
président élu lors de la présidentielle du 25 octobre dernier avec
58,46 % des voix, a tout de suite donné le ton de ce que sera sa gestion
des affaires.
Il a organisé une descente surprise au ministère des Finances, à pied
s’il vous plaît, et les fonctionnaires absents en ont eu pour leur
compte. Même visite inopinée à l’hôpital général de Dar es Salam
où il a découvert des patients créchant à même le sol, des appareils en
panne, la pharmacie centrale en pénurie de médicaments alors que dans
l’enceinte de l’établissement pullulent des pharmacies privées vendant
ces mêmes produits détournés en fait par et au profit des médecins. John
Magufuli a piqué un coup de sang, fermé à clé lui-même lesdites
pharmacies privées et viré le directeur de l’hôpital sur le champ. Des
fonctionnaires ont été emprisonnés quelques heures pour être arrivés en
retard à une réunion, le directeur de l’administration fiscale suspendu
de ses fonctions, après que le Premier ministre Kassim Majaliwa
a mené une inspection surprise au port de Dar es Salaam, pour constater
la disparition de conteneurs en provenance de l’étranger.
Sur cette lancée, le nouveau numéro 1 tanzanien a pris des décisions
fortes visant à réduire le gaspillage des ressources publiques dont la réduction des déplacements des ministres à l’étranger,
des voitures de fonction, des budgets, entre autres. Ainsi il a annulé
la célébration fastueuse en ce mois de décembre des festivités de
l’indépendance du pays afin, dit-il, de faire une économie d’argent à
investir dans une campagne de nettoyage des villes pour lutter contre le
choléra qui sévit dans le pays. « Il est simplement honteux que nous
dépensions tant d’argent pour célébrer 54 ans d’indépendance quand notre
peuple meurt de choléra », une maladie qui a tué 150 personnes ces
trois derniers mois en Tanzanie selon l’Organisation mondiale de la
santé (Oms), a-t-il déclaré.
John Magufuli a par ailleurs ordonné la diminution de 90 % du budget habituellement alloué au dîner
marquant le début des travaux du Parlement et les fonds économisés ont
été consacrés à l’achat de lits d’hôpitaux et à des travaux de réfection
sur la voie publique. Les voyages non urgents à l’étranger sont aussi
interdits pour les ministres. Pour lui, ils peuvent être représentés par
des ambassadeurs de la Tanzanie en poste dans ces pays. Ses ministres
n’ont plus droit à l’achat de billets d’avion en classe affaire. Le
président a aussi décidé que les conseils des ministres aient lieu dans
des bâtiments publics, au lieu des hôtels. Une délégation de cinquante
(50) personnes composée pour visiter des pays du Commonwealth a été
réduite, sous ses instructions, à quatre (04).
Toutes ces mesures ne visent qu’à promouvoir la bonne gouvernance
devant profiter à tous les citoyens. Il nous revient qu’un policier
filmé en train de racketter un citoyen et dont l’image a été publiée sur
les réseaux sociaux, a été sanctionné. Ces dispositions tiennent
peut-être des origines modestes du nouveau président et des valeurs
morales reçues. « Notre maison était de chaume, et comme beaucoup de
garçons, j’ai été chargé de garder le bétail, de vendre du lait et du
poisson pour soutenir ma famille », déclarait-il lors d’un de ses
derniers meetings de campagne, ajoutant : « Je sais ce que cela signifie
d’être pauvre. Je m’efforcerai d’aider à améliorer le bien-être des
gens ».
Faure Gnassingbé appelé à s’en inspirer
Même s’il est critiqué par certains concitoyens qui voient à travers
ces mesures un simple show pour attirer les regards sur sa personne,
évoquant les mêmes réflexes de son prédécesseur au poste, Jakaya
Kikwete, à son avènement au pouvoir, lequel a malheureusement renoncé à
la lutte engagée pour laisser perdurer les mêmes fléaux, ces initiatives
séduisent la grande majorité des Tanzaniens et sont saluées par la
presse et même par certains adversaires politiques. C’est le cas de
l’ancien président du parti d’opposition Front civique uni (Cuf),
Ibrahim Lipumba, qui s’est rendu au palais présidentiel pour l’en
féliciter. Et ce n’est pas nous autres Togolais que ces bonnes
dispositions d’esprit ne vont pas séduire, nous qui vivons ici au
quotidien ces nombreux fléaux combattus par John Magufuli.
Des engagements et déclamations de lutte contre ces fléaux, il y en a
pourtant eu à foison depuis l’avènement de Faure Gnassingbé au pouvoir.
Lui-même faisait le constat (hypocrite) le 26 avril 2012 qu’une
minorité accapare les ressources nationales et laisse la grande majorité
dans la dèche. « Afin de moraliser la vie publique et de promouvoir
l’éthique et la déontologie ainsi que la transparence et l’efficacité de
la gestion des biens publics, le Gouvernement entend accélérer le
processus de mise en place de la Haute autorité de la lutte contre la
corruption. La lutte contre la corruption sera intensifiée, grâce
notamment à l’actualisation en cours du code pénal qui permettra de
mieux organiser la poursuite et la répression des crimes économiques »,
annonçait le 29 juin 2015 le Premier ministre Komi Sélom Klassou dans
son discours programme devant les députés. Bref, c’est une tolérance
zéro qui est décrétée dans les discours contre les prévaricateurs, mais
la réalité est intacte sur le terrain.
L’enrichissement illicite sur fond de détournement des ressources
nationales est un sport national. Un petit séjour au gouvernement suffit
à tout individu pour s’offrir un palais, des véhicules et autres biens
qu’il n’aurait pu jamais avoir, bref réaliser sa vie. Des ministres se
construisent des demeures princières et des châteaux dans leurs fermes,
entourés de hangars et maisons en banco. Les retro-commissions sur des
marchés sont une question d’habitude. Ici, même en cas de malversation,
on n’est nullement inquiété si l’on est du parti au pouvoir. Le minimum
d’actes concrets posés par le régime n’est en réalité destiné qu’à
répondre aux injonctions des partenaires et leur plaire. Mais rien n’est
fait de façon concrète pour mettre fin à ces fléaux de détournement de
deniers publics, au gaspillage des ressources nationales, à
l’enrichissement illicite. C’est l’Etat même qui semble encourager le
gaspillage à travers des dépenses inconsidérées. La preuve palpable est
le pactole de 5,5 milliards de FCFA que le gouvernement compte investir
dans l’organisation de ce machin truc de conférence sur la sécurité
maritime, alors même que le CHU Sylvanus Olympio manque du minimum
d’équipements. Faure Gnassingbé lui-même n’hésite pas à engager des
voyages tous azimuts et onéreux aux frais de la princesse, avec des
délégations kilométriques parmi lesquelles des opposants – suivez les
regards.
Le président tanzanien prouve que la meilleure façon de lutter contre
ces fléaux, c’est de montrer l’exemple ; et cela passe par la réduction
du train de vie de l’Etat. Tout comme la paix qui n’est pas un mot,
mais un comportement, la bonne gouvernance et la lutte contre le
gaspillage, la corruption et autres fléaux ne doivent pas être que des
discours, mais des comportements, des actes forts. Copier une bonne
chose chez quelqu’un est aussi une forme d’intelligence. Les Togolais
pourraient bien l’adouber davantage (sic) si Faure Gnassingbé suivait
les pas de son pair tanzanien.
Source : [09/12/2015] Tino Kossi, Liberté
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