Le « cyclone » électoral au Togo est passé le 25 avril dernier et ne semble pas avoir fait de dégâts, pas du moins ceux que l’on aurait pu croire. Faure Gnassingbé a été « réélu » pour un mandat de 5 ans, dans une parodie d’élection démocratique. Des millions de personnes ont vu en direct à la télévision nationale togolaise la supercherie orchestrée par la CENI, la commission électorale nationale « indépendante » proclamer la victoire du président sortant avant même que l’ensemble des bureaux de votes n’aient été compilés. Pas de manifestations, pas d’échauffourées, le calme semble peser étrangement au lendemain de cet événement, comme si les Togolais avaient reçu un coup de massue et qu’ils en étaient encore sonnés. Il faut dire que depuis les « résultats », l’armée quadrille les points névralgiques de la ville de Lomé et se fait dissuasive. Mais ce calme apparent ne masque-t-il pas une autre réalité ? Celle d’un Togo qui gronde, qui prend son temps pour réfléchir avant de passer à l’action ?
Les réseaux sociaux se sont enflammés à la suite de cette proclamation, objectant qu’on « leur a volé ces élections ». La diaspora togolaise a invité ses ressortissants à manifester par deux fois à Paris devant l’ambassade du Togo, puis au Trocadéro. Aux Etats-Unis, la communauté togolaise va manifester devant la Maison-Blanche pour attirer l’attention de la communauté internationale sur la situation catastrophique du Togo.
Les Togolais sont dans l’attente d’un événement
Le principal opposant, Jean-Pierre Fabre, qui s’est déclaré « vrai vainqueur de ces élections » et qui avait jusqu’alors lancé un appel au calme à la population togolaise, a décidé d’organiser un grand meeting d’information et de mobilisation qui doit avoir lieu samedi 9 mai à Lomé. Comment arracher la victoire qui lui revient ? C’est peut-être ce qu’il expliquera samedi. En attendant, le peuple togolais n’en revient pas, il ne peut pas croire que Faure Gnassingbé sera encore pour cinq ans le maître du Togo. Déjà, avant les élections, Eric Dupuy, directeur de la communication de CAP 2015, le parti de l’opposition, avait prévenu : « Il partira par les urnes ou par la rue ». Il n’est pas parti par les urnes. Alors, la rue ? On se souvient que malheureusement par le passé, au cours de précédentes « élections » présidentielles au Togo, des émeutes avaient fait 500 morts parmi la population. Les Togolais n’ont peut-être pas envie de revivre ça, mais… l’heure est grave et le changement attendu. Beaucoup portent leur espoir sur Jean-Pierre Fabre qui, espérons-le, saura trouver la solution la plus adéquate pour aider les Togolais à sortir de cette impasse.
Car la communauté internationale n’a pas réagi malheureusement. Les différents médias français et internationaux ont pris acte de la « réélection » de Faure Gnassingbé, sans prendre part à la polémique. Même l’OIF, à qui avait fait appel Jean-Pierre Fabre dans un premier temps, pour l’aider à organiser un recomptage des voix, a fait défection en la personne de Michaelle Jean qui a « félicité » le président « élu ». Amère déception de la part des Togolais ! Concernant les médias français, seuls 54 Etats et Rue 89 ont fait état de la situation telle qu’elle est et ont exprimé des doutes sérieux sur la légitimité de ces résultats officiels. Enfin, on a vu tout de même des réactions (il est important de le signaler) de la part d’organes politiques : Le Parti communiste français (PCF) appelle la France et l’Union européenne à un « recomptage des voix ». De même, la formation Europe écologie les Verts (EELV) a publié un communiqué de presse dénonçant la « mascarade électorale qui se joue au Togo ».
Dans une Afrique émergente, aux portes de ses « trente glorieuses », le Togo fait figure de moyen-âge, où la politique de la « françafrique » est toujours d’actualité, où le pays ne dispose pratiquement d’aucune infrastructure sanitaire : A Lomé, la capitale, des quartiers entiers n’ont pas d’eau potable, pas d’électricité, pas de chaussée ! …
Mais la démocratie, la vraie, est une vague qui viendra s’abattre sur le Togo comme sur le reste de l’Afrique. Les événements au Bénin voisin, au Burkina Faso, au Nigeria ou encore au Burundi préfigurent une nouvelle donne en Afrique et ce sera le cas aussi du Togo. Espérons simplement que cela se fasse en douceur, sans violence et… le plus rapidement possible.
ARNAUD LONGATTE
JOURNALISTE
45etats.com
No comments:
Post a Comment