La véritable histoire de l’or « togolais » raffiné en Suisse :
Chaque année, la Suisse importe plusieurs tonnes d’or provenant du
Togo. Pourtant, ce pays d’Afrique de l’Ouest n’en produit pas. D’où
vient cet or? La DB est partie sur les traces du métal précieux, jusque
dans les profondeurs des mines, où des enfants risquent leur vie chaque
jour.
Sur la base de témoignages et de documents exclusifs, la
DB a remonté la chaîne d’approvisionnement de l’or «togolais»,
de la raffinerie tessinoise Valcambi aux mines artisanales du Burkina
Faso, dans lesquelles adultes et enfants travaillent dans des conditions
innommables.
A partir de douze ans, les enfants exécutent les mêmes tâches que les
adultes, y compris les plus pénibles et dangereuses. Il s’agit de l’une
des «pires formes de travail d’enfants» – c’est-à-dire des travaux
«susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité ou à la moralité de
l’enfant», selon la définition de l’Organisation internationale du
travail (OIT).
Dans les mines
Munis d’une simple corde en chanvre, les mineurs descendent dans des
conduits peu sécurisés et très mal ventilés pouvant atteindre jusqu’à
170 mètres de profondeur.
Mine d’or artisanal de Tikando, Burkina Faso © Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
Les mineurs descendent dans les conduits sans casque, sans gant ni
lunettes de protection. Ils prennent souvent des amphétamines pour
lutter contre la faim et la peur pendant les longues heures qu’ils
passeront sous terre.
Jeune mineur dans la mine d’or artisanale de Tikando au Burkina Faso © Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
De nombreuses familles vivent dans des campements de fortune, agglomérés autour des sites d’extraction
Bidonville au tour des sites d’extraction artisanale de l’or à Tikando au Burkina Faso © Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
Le travail dans les mines se poursuit même à la saison des pluies, en dépit des risques d’effondrement.
© Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
Le concassage des pierres, une activité pénible. Les travailleurs,
ici des adolescents, respirent en permanence de la poussière, s’exposant
à de graves maladies pulmonaires et respiratoires.
Concassage de pierre dans une mine d Alga au Burkina Faso © Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
Partout, la poussière. Même ici, à la saison des pluies. Les gens mangent, dorment et travaillent dans un paysage chaotique.
Des enfants respirent la poussière lourdes des pierres concassées, Alga, Burkina Faso © Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
Les travailleurs doivent constamment porter des charges trop lourdes,
ce qui conduit à des lésions osseuses et musculaires parfois
irréversibles.
Séparer le minerai des résidus sans valeur, une tâche souvent confiée
aux enfants. Chaque jour, les mineurs sont exposés au mercure, au
cyanure et autres produits toxiques utilisés pour extraire l’or. La
plupart des travailleurs ignorent les risques sanitaires liés à leur
activité.
Porter de lourdes (g) charges et séparer le minerai des résidus, la tâche des enfants © Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
Douze heures de travail par jour, de jour comme de nuit. Les yeux rougis par la poussière.
© Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
Des enfants sont impliqués à toutes les étapes de la production. Les
femmes et les jeunes filles ne descendent pas dans les mines, mais
travaillent aussi sur les sites de production.
Filles
et jeunes femmes aussi impliquees a toutes les etapes de la production,
Tikando, Burkina Faso © Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
De nombreux enfants quittent leur village et leur famille pour
devenir mineur, attirés par un revenu de quelques francs par semaine,
dans un pays où la moitié de la population vit en-dessous du seuil de
pauvreté. Ils abandonnent l’école – et tout espoir de travailler un jour
en dehors du secteur artisanal.
Mine d’or artisanale de Tikando, Burkina Faso © Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
Dans les mines artisanales du Burkina Faso, entre 30 et 50% des travailleurs n’ont pas atteint l’âge adulte
© Pep Bonnet/Noor/Keystone, 2015
La filière de l’or
Cliquez sur l’infographie pour voir plus de détails sur la filière de l’or.
Comment l’or «togolais» arrive-t-il en Suisse?
Chaque année, des milliers de tonnes d’or minier sont importés en
Suisse. Très peu d’informations filtrent sur l’origine de ce métal
précieux. Les raffineurs prétendent que leurs chaînes
d’approvisionnement sont soumises à des contrôles très stricts.
Pourtant, notre enquête révèle que l’or importé du Togo provient en
réalité des mines artisanales du Burkina Faso. Le métal précieux y est
extrait dans des conditions déplorables par une main d’œuvre composée de
30 à 50% d’enfants. Cet or est ensuite acheminé illégalement au Togo
par des réseaux de contrebandes. Ce trafic prive le Burkina Faso de
revenus essentiels pour son développement, alors que la moitié de la
population vit en-dessous du seuil de pauvreté.
A Lomé, capitale du Togo, le métal précieux est acheté par une
famille libanaise qui l’exporte, désormais en toute légalité, vers son
antenne genevoise. Cet or illégitime est ensuite vendu à Valcambi, la
plus importante raffinerie de Suisse. Alors qu’elle prétend appliquer
les standards «les plus stricts» pour garantir le respect des droits
humains sur l’ensemble de sa chaîne d’approvisionnement, Valcambi ne
semble pas se soucier de la véritable origine de cet or. Comme souvent,
les autorités suisses préfèrent «ne pas savoir», selon l’expression
employée par une source au sein de la police fédérale.
Les mesures volontaires ne suffisent pas
L’origine problématique de l’or «togolais» raffiné en Suisse par
Valcambi montre une fois encore l’insuffisance des mesures volontaires
prises par les entreprises pour prévenir les violations des droits
humains. Le Conseil fédéral reconnait les risques associés à ce secteur
très lucratif et souligne l’importance de renforcer les standards en
matière de transparence et de responsabilité. Pourtant, les efforts pour
prévenir l’importation en Suisse d’or entaché par la corruption, les
dégâts environnementaux ou les violations des droits humains restent
largement insuffisants.
Afin de remédier à cette situation scandaleuse, la DB et plus de soixante organisations suisses ont lancé, en avril 2015,
une initiative populaire pour des multinationales responsables.
Elle demande que les sociétés domiciliées en Suisse aient l’obligation
légale de s’assurer que leurs activités ne conduisent pas, directement
ou indirectement, à des violations des droits humains ou à des atteintes
à l’environnement.
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La véritable histoire de l’or « togolais » raffiné en Suisse
Lire / Télécharger le résumé : Un filon d’or
Campagne réalisée avec le soutien de la Fédération genevoise de coopération (FGC)
et de la Fédération vaudoise de coopération (Fedevaco).
Source :
Déclaration de Berne and 27 avril